L'insécurité est au coin de la rue.

le 22/11/2002 à 22h04

Cette semaine, dans ma rue, s’est joué un micro-drame de l’insécurité. Oui, ma rue a peur. Tout d’abord, plantons le décor. La rue ou je vis est une rue relativement calme, bordée de divers restaurants, bouquinistes et de magasins d’instrument de musique. Il y a souvent de la musique, en quelques mots, c’est une rue sympa.
Dans cette même rue, il y a un magasin pour les skaters hardcoreux, et par conséquent plein de djeunz à casquettes, habillés comme des zazous et avec des chiens gros et laids occupent généralement le pavé devant l’échoppe susnommée. Bon, je me contrebalance que ces sous-punks zonent à coté de chez moi, on ne partage certes pas les même goûts mais ils ne viennent pas me faire chier.
Enfin bref, l’autre jour, il était cinq heures passée, je revenais de cours et remontai tranquillement ma rue. A quelques mètres, je vois deux gusses qui s’empoignent. L’un est un jeune à casquette et à gros clébard qui hante la rue et l’autre un bobo quadragénaire. Comme je continue de marcher, j’entends ce qu’ils se disent. Le jeune fait savoir avec force hurlements que le quadra n’aurait pas du insulter sa femme. Bon, leur affaire ne me regarde pas, je continue donc mon chemin, tandis que le ton monte entre les deux types.

Evidemment, c’est juste au moment où je passe devant eux qu’ils choisissent de s’échauffer plus que de raison et se sauter à la gorge. N’écoutant que mon courage, je passe donc mon chemin – D’abord c’est pas mes affaires, et j’ai pas envie de me prendre un pain perdu… - Puis, quasiment arrivé à ma porte, j’entends une fille qui crie un truc du genre « Fait gaffe, il a un couteau ». Là, même si je suis un gros couard, je me retourne assez inquiet, juste à temps pour voir un gamin qui coure dans ma direction et pleurant tout ce qu’il sait. Je l’attrape au passage et le tient contre moi. Je le garde prés de moi un instant, alors que d’autres jeunes courent séparer les deux mecs.

Le gosse – Jordan – et moi nous rapprochons. Jordan m’explique que son papa est le jeune à casquette et que c’est pas son papa qui a sorti son couteau, mais l’autre. Là, stupeur.. Eh oui, c’est le quadra bien propre sur lui qui a tenté de planter le jeune. De fil en aiguille, j’apprends le pourquoi de cette scène surréaliste. Le jeune, sa femme, son fils Jordan et son gros clébard passaient dans la rue. Le quadra, lui, était également avec son fils et rentrait chez lui. Le chien du jeune est allé renifler le gamin du quadra. Et c’est là que visiblement le quadra a pété les plombs. Il a gueulé comme quoi le chien aurait du être attaché et tout ça. La femme du jeune lui dit un truc comme « Bah, c’est pas grave ». Deuxième pétage de plomb du quadra, qui l’insulte, la traitre d’ivrogne et autre trucs sympathique. Le jeune, forcément s’énerve et s’engueulent. Ils en viennent aux mains et puis le quadra, débloquant à plein tube, sort un couteau et menace le jeune., qui se retrouve par terre, je sais pas trop comment. La quadra rentre chez lui, ferme la grille qui protége la cour, et appelle les flics, qui arrivent sur place rapidement.
Alors devinez qui ils ont choisi d’embarquer, entre le quadragénaire bien propre sur lui et respectable, mais qui a néanmoins tenter de filer un coup de couteau au jeune et a insulté sa femme, et le fameux jeune, pas propre sur lui, vaguement basané, qui a un gros clebs et qui a un gros défaut : être un jeune a casquette ? Eh oui, notre ami a gagné un joli voyage accompagné jusqu’au commissariat de quartier. Veinard, va !

Comme tout un chacun, j’aurais d’abord eu tendance que c’était le jeune qui avait sorti le couteau. Comme quoi, faut vraiment pas se fier aux apparences. Mais ce pitoyable fait divers ne montre-t-il pas que la France, à l’image des Etats-Unis, est en train de sombrer dans la paranoïa sécuritaire, où tout le monde a peur de tout le monde ? Ne va-t-on pas finir par avoir la trouille de tout ce qui est différent et qu’on ne connaît pas, et qu’on détruira histoire de dormir tranquille sur nos deux oreilles ?

Je terminerais cette chronique par une phrase stupéfiante prononcé par notre véhément Ministre de l’Intérieur, Mr Nicolas Sarkozy. Tiré d’un article du Figaro (du 12 novembre 2002) où on l’interrogeait à propos de Sangatte. Je vous invite à méditer cette phrase qui ne nous laisse pas présager que des bonne choses et qui nous en dit long sur le bonhomme:
« J’aimerais que ceux qui sont animés de beaux sentiments mais qui sont incapable d’agir m’expliquent comment traiter humainement des gens que l’on ne connaît pas »

Je ne dirais pas « Salut, l’enfoiré » parce que je risque de finir au trou, et puis parce que ça rappelle les Restos du Cœur. Mais bon, il y a des gens qui le pensent, et je ne les désapprouve pas.

Soundtrack: TTC - Léguman