C'est ce que j'appelle un aprés-midi pourri

le 24/04/2004 à 23h55

Je viens de faire une poussée de misanthropie haineuse, du genre de celle qui vous font imaginer des scènes de carnages avec des bouts de chairs qui volent et des effets pyrotechniques intéressants. Ça faisait longtemps que je ne m'étais pas senti énervé à ce point-là. Et pourquoi ? Pour des conneries, comme d'habitude.

A la fin d'un après-midi long et chiant, on m'annonce que nous allons faire une visite chez mes grands-parents. Je n'ai pas franchement envie d'y aller, mais je me force. On part. Déjà mon père ne veut pas conduire. Ce qui veut dire que c'est moi qui vais devoir le faire, et que je vais avoir droit comme à chaque fois que je prends le volant avec mon père à ces conseils avisés. J'ai horreur qu'on fasse des commentaires quand je conduis. Donc déjà les quelques kilomètres qui me sépare de l'immeuble où vivent mes grands-parents sont déjà une épreuve pour mes nerfs. Je serre les doigts sur le volant et commence à maugréer. Encore plus lorsque je pense qu'après il y aura le retour.

On arrive. Je dis bonjour. Tiens mon grand-père n'est pas là. « Donne moi les clés de voiture, je vais le chercher » me dit mon père. « Mais il est au jardin, ça fait même pas deux minutes à pieds ». « Je sais, mais passe moi les clés. ». Bien bien bien, faut pas chercher à comprendre. Depuis que le médecin lui a filé des espèces d'anti-dépresseurs, j'ai l'impression qu'il disjoncte. Et puis, comme un ami à lui est passé plus tôt dans l'après-midi, je suppose qu'il a du les arroser avec un quelconque liquide alcoolisé. Ce qui fait évidemment bon ménage.

Il part donc, et je reste avec ma soeur et ma grand-mère. Ma soeur fête ses 18 ans, et ma grand-mère - je l'aime beaucoup mais il y a des limites au supportable - commence à radoter sur le thème « Alors, ça fait quoi d'avoir 18 ans ? ». Bah rien, ça ne fait rien du tout. On est toujours la même personne. Ma soeur a beau lui répéter que cela ne change pas beaucoup de choses, ma grand-mère ne lâche pas le morceau. Puis, c'est à moi qu'elle s'en prend. « Oui, faudra que tu sortes ta soeur pour ses 18 ans hein, parce que les 18 ans de ton père, on les a bien fêtés, alors faut que tu emmènes ta soeur au bal. Oui, faut que tu la sortes, faut qu'elle s'amuse ». Elle continue sur le même thème pendant 5 minutes, même après ma fausse promesse d'amener ma soeur quelque part. Je suis bien convaincu que si ma soeur veut sortir, elle préférera sans doute se passer de moi, quand à moi, les bals du coin, merci bien. Si je veux voir des blaireaux, j'ai qu'à regarder « Les Colocataires ».

Je me rends compte que ça fait plus de vingt minutes qu'on attend que mon père revienne et que ma grand-mère continue sur le thème « moi de mon temps, on fêtait ses 18 ans ». Il faut à peine cinq minutes pour faire l'aller-retour jusqu'au jardin où se trouve mon grand-père. Comme ma soeur et moi saturons un peu, on décide d'aller à ce foutu jardin à pieds afin de retrouver la voiture et de se casser. Arrivé au jardin, pas de voiture. « Bon, où-ils sont ? ». « On les a pas croisés pourtant en venant jusqu'ici ? ». Ma soeur me dit non. Je me dis « Ne nous énervons pas » mais il est bien trop tard. Nous retournons chez mes grands-parents. Bien évidemment la voiture est là, alors qu'on ne l'a pas croisée. Nous rentrons de nouveau chez ma grand-mère. « On y va  » fait ma soeur. « Ah, je bois un apéro avant » dit mon père. Ben tiens, je m'en serais même pas douté. C'est les anti-dépresseurs qui vont être content de socialiser avec le pastis. Nous attendons encore un petit quart-d'heure. Heureusement, ma grand-mère regarde la télé et se plaint de mon grand-père à qui veut bien l'écouter. Je fais les cents pas. Enfin, on peut partir. Je n'ai plus qu'à supporter le voyage de retour.

Je rentre chez moi. J'ai envie de casser des objets sur la tête de personnes innocentes. Tiens, les Petits Chanteurs à la Croix de Bois par exemple. Ou l'autre connard avec sa tête de porte-bonheur qui est en 1ere année. J'aimerais le gifler jusqu'à avoir des cloques aux doigts. Quelle détente ce serait. Mais hélas, il n'est pas là et puis la violence ne résout pas grand chose.
Je me rends soudain compte que je suis seul, ce qui décuple ma colère. La fille que j'aime est loin, j'aimerais être prés d'elle, dans l'instant, mais je ne peux pas. Mes amis ? Loin. A part un, qui vit tout prés, mais il est trop tard pour aller l'ennuyer à domicile. Je suis seul, bordel, SEUL ! Je voudrais parler à des gens, mais il n'y a personne. Et comme si ça suffisait pas, mon père viens me dire que « oui, tu me cache des choses sur toi, je sais pas ce qui se passe dans ta vie, qui est ta copine, blah, blah, blah ». Il manquait plus que ça, une tentative pour retrouver la complicité père-fils que l'on avait quand j'avais 5 ans. Voilà, je craque. Qu'on m'amène un Petit Chanteur à la Croix de Bois et une clé à molette, par pitié.

Il faut que je fasse quelque chose. Je décide donc de manger, et comme ma soeur m'a demandé de la déposer, je décide également d'aller me poser dans la nature, après l'avoir déposée, pour fumer quelques roulées. Et là, assis dans un chemin, faisant tourner une pensée sauvage entre mes doigts, et parlant aux vaches qui seront mes seules compagnes de la soirée, je me dis qu'une bonne clope, l'air frais des Combrailles et la simple idée de pouvoir écouter « Nationale 7 » en rentrant, ça pourrait presque passer pour un court moment de bonheur. Et j'en oublie le reste.

Soundtrack: Stereo Total - Nationale 7